Que dire de plus?
Paul
l’avait reconnue tout de suite, en dépit des longues années passées
sans elle depuis leur rupture. Elle avait surgi inopinément au détour
d’une rue, image fugace que son œil avide n’avait pas manqué. Obéissant
à une impulsion irrépressible il la suivit, en prenant un luxe de
précautions digne, pensait-il, d’un agent secret, longeant les murs, se dissimulant
derrière le mobilier urbain . Nul doute qu’un observateur averti n’aurait point manqué de le
remarquer, tant son manège était évident! Cela n’arriva
point : La foule, courant après ses propres chimères, poursuivait sa
route, sans se soucier de cet énergumène sautillant d’ abribus en
panneaux indicateurs. C’est le lot des villes modernes que cette immunité de l’indifférence . Et de toutes façons, ce ne sont pas les types
bizarres qui manquent, n’est ce pas? La "poursuite"
dura un bon quart d’heure avant qu’elle ne pénétrât enfin dans un
magasin de liqueurs et spiritueux. Paul , ne voulant pas être
reconnu, ne se risqua pas à la suivre dans cet espace clos ou sa cape
d’invisibilité disparaitrait à coup sûr. Puis, lui revînt à l’esprit le
métier qu’exerçait la belle jadis: Œnologue! . Apparemment elle
officiait encore dans cette branche, et maintenant qu’il l’avait
"logée", comme disent les flics, il trouverait surement le courage de
l’aborder à nouveau, un jour…
Cinq
ans auparavant, ils filaient, tous deux, le parfait amour. Des nuits
câlines aux sorties restaurant, des tendres baisers aux doux
enlacements, des petites disputes insignifiantes aux réconciliations
tapageuses, tout l’inventaire des amoureux éperdus y était passé. Il la
choyait de tout son cœur et elle le lui rendait bien. La construction
de leur bonheur allait bon train, vite, trop vite peut être. Jusqu’à ce
que les lézardes de la discorde fassent leur œuvre, imperceptiblement
mais implacablement. Il n’avait, classiquement, rien vu venir, ou pas
voulu voir. Le soir où il reçut le message fatidique, il bullait paisiblement devant son téléviseur quand son téléphone tinta . Le message laconique, SmS, contenait une suite de
mots communs dont l’effet, pourtant, le jeta dans l’abîme:
" Je ne
t’aime plus, je suis désolée…que dire de plus?".
"DÉSOLÉE!" "QUE DIRE
DE PLUS?!!!!" Brailla t-il. Le désespoir étouffait ses larmes, mordait
à pleines dents la moindre parcelle de son âme. Que dire? Bien des
choses en somme, mais jamais elle ne répondit à ses suppliques, et il
resta là, planté, au propre comme au figuré. Il cessa, peu à peu, de
tenter de la joindre. Jamais il n’aurait d’explications et voilà tout.
Le chagrin prit sa place doucement, à la manière d’une musique
d’ascenseur lancinante à laquelle on finit par s’habituer…
Il
laissa passer trois jours, après la rencontre fortuite, le temps de
puiser quelques forces et de réfléchir à ce qu’il pourrait bien lui
dire. Il se le demandait encore, quand il arriva devant le magasin de
spiritueux. Il entra et se dirigea vers elle. Toujours aussi belle,
radieuse même. " Mademoiselle?" demanda t-il. Se retournant avec une
grâce qui lui cloua le cœur elle commença: "Oui Mons…" son regard
s’alluma: " Oh Paul , c’est toi? quelle surprise! ça me fait bien
plaisir…que deviens tu?".
Et tandis que jaillissait la lame
d’acier , Paul , comme dans un rêve, s’entendit répondre: " je suis
désolé…que dire de plus?". Le corps de la belle glissa mollement au
sol, sans un cri, et resta là, planté… au propre.
l’avait reconnue tout de suite, en dépit des longues années passées
sans elle depuis leur rupture. Elle avait surgi inopinément au détour
d’une rue, image fugace que son œil avide n’avait pas manqué. Obéissant
à une impulsion irrépressible il la suivit, en prenant un luxe de
précautions digne, pensait-il, d’un agent secret, longeant les murs, se dissimulant
derrière le mobilier urbain . Nul doute qu’un observateur averti n’aurait point manqué de le
remarquer, tant son manège était évident! Cela n’arriva
point : La foule, courant après ses propres chimères, poursuivait sa
route, sans se soucier de cet énergumène sautillant d’ abribus en
panneaux indicateurs. C’est le lot des villes modernes que cette immunité de l’indifférence . Et de toutes façons, ce ne sont pas les types
bizarres qui manquent, n’est ce pas? La "poursuite"
dura un bon quart d’heure avant qu’elle ne pénétrât enfin dans un
magasin de liqueurs et spiritueux. Paul , ne voulant pas être
reconnu, ne se risqua pas à la suivre dans cet espace clos ou sa cape
d’invisibilité disparaitrait à coup sûr. Puis, lui revînt à l’esprit le
métier qu’exerçait la belle jadis: Œnologue! . Apparemment elle
officiait encore dans cette branche, et maintenant qu’il l’avait
"logée", comme disent les flics, il trouverait surement le courage de
l’aborder à nouveau, un jour…
Cinq
ans auparavant, ils filaient, tous deux, le parfait amour. Des nuits
câlines aux sorties restaurant, des tendres baisers aux doux
enlacements, des petites disputes insignifiantes aux réconciliations
tapageuses, tout l’inventaire des amoureux éperdus y était passé. Il la
choyait de tout son cœur et elle le lui rendait bien. La construction
de leur bonheur allait bon train, vite, trop vite peut être. Jusqu’à ce
que les lézardes de la discorde fassent leur œuvre, imperceptiblement
mais implacablement. Il n’avait, classiquement, rien vu venir, ou pas
voulu voir. Le soir où il reçut le message fatidique, il bullait paisiblement devant son téléviseur quand son téléphone tinta . Le message laconique, SmS, contenait une suite de
mots communs dont l’effet, pourtant, le jeta dans l’abîme:
" Je ne
t’aime plus, je suis désolée…que dire de plus?".
"DÉSOLÉE!" "QUE DIRE
DE PLUS?!!!!" Brailla t-il. Le désespoir étouffait ses larmes, mordait
à pleines dents la moindre parcelle de son âme. Que dire? Bien des
choses en somme, mais jamais elle ne répondit à ses suppliques, et il
resta là, planté, au propre comme au figuré. Il cessa, peu à peu, de
tenter de la joindre. Jamais il n’aurait d’explications et voilà tout.
Le chagrin prit sa place doucement, à la manière d’une musique
d’ascenseur lancinante à laquelle on finit par s’habituer…
Il
laissa passer trois jours, après la rencontre fortuite, le temps de
puiser quelques forces et de réfléchir à ce qu’il pourrait bien lui
dire. Il se le demandait encore, quand il arriva devant le magasin de
spiritueux. Il entra et se dirigea vers elle. Toujours aussi belle,
radieuse même. " Mademoiselle?" demanda t-il. Se retournant avec une
grâce qui lui cloua le cœur elle commença: "Oui Mons…" son regard
s’alluma: " Oh Paul , c’est toi? quelle surprise! ça me fait bien
plaisir…que deviens tu?".
Et tandis que jaillissait la lame
d’acier , Paul , comme dans un rêve, s’entendit répondre: " je suis
désolé…que dire de plus?". Le corps de la belle glissa mollement au
sol, sans un cri, et resta là, planté… au propre.
ça met bien la pêche hein?
Philippe
27 octobre 2009 at 18 h 12 min
"L’amour c’est n’avoir jamais à dire que l’on est désolé" Phrase culte du non moins cultissime Love Story !
cata
27 octobre 2009 at 18 h 55 min
exactement: le mot qui tue…
Sylvie...
27 octobre 2009 at 19 h 04 min
Aucun crime ne peut se justifier par la passion, quelle qu’elle soit. Ni même l’orgueil blessé d’être quitté avec un sms. Au risque de ne pas vouloir blesser par les motivations du désamour, il vaut mieux laisser quelques questions en suspend. Que dire de plus ??…
babycake
27 octobre 2009 at 19 h 15 min
Bah au moins elle a été franche… moi j’ai eu écris "je suis pas prete, ça va trop vite" alors que j’aurais aimé écrire "t’es un beauf et zero au lit…." donc elle a été gentille la nana… quand à attendre 3 jours, c’est pas assez!!!!!! quoi que celui à qui j’ai envoyé ledit sms il peu venir 10 ans plus tard, c’est du pareil au meme!!!!!!!!!!!!Bises !
Mata
27 octobre 2009 at 19 h 15 min
Au moins c’est pas de la guimauve même si la rupture est pour le moins maladroite. Que dire de plus ? :)
Christophe
27 octobre 2009 at 19 h 40 min
La seule personne, à ma connaissance, qui possède une cape d’invisibilité est Harry Potter: affaire résolue. A+
Pascal
27 octobre 2009 at 19 h 45 min
Très bien écrit. Chapeau bas.PS : idem pour la cape d’invisibilité 😉
Edouard
27 octobre 2009 at 19 h 49 min
Pourquoi ce texte est-il dans la catégorie bananes flambées ? parce qu’il y est question d’ustensiles de cuisine ? ;)cinq ans à ruminer… c’était un grand amour alors :)J’aime bien ton texteBises Mu (Mylène Farmer étant sortie de mon corps 😉
mu
27 octobre 2009 at 20 h 29 min
J’aime bien la finEst-ce du vécu ?Bizzzzz
bibialien
28 octobre 2009 at 2 h 55 min
Les hommes ne comprennent jamais qu’on puisse ne plus les aimer. Ce texte me renvoie à des mauvais souvenirs…Très bien écrit très réel, du Philippe classé grand Cru.
Caiçara
28 octobre 2009 at 6 h 55 min
Bien sûr que c’est du vécu: Je flingue au moins cinq personnes par jour. Mais jamais pour des motifs aussi vulgaires que l’amour…
Philippe
28 octobre 2009 at 7 h 20 min
L’amour est pour moi le seul motif valable qui justifie un meurtre
bibialien
28 octobre 2009 at 8 h 47 min
alors la sans lire les autres coms celui de bibi me va comme un gant !
LA DAME
28 octobre 2009 at 9 h 01 min
beau recit encore une fois merci !!! …. le dessert c’etait bananes flambées au resto ?bisous Phil douce journée
Odha
28 octobre 2009 at 11 h 00 min
Quelle époque ! On envoie un sms et on reçoit un coup de couteau et on s’étonne qu’il y a de plus en plus de personnes seules !Minou
cata
28 octobre 2009 at 13 h 05 min
Pour ce qui est de justifier un meurtre par amour alors là NON!!!!Je tuerais volontier quiconque fera du mal à mes enfants mais tuer qq un juste pask il ne m’aime plus, non!!!Je dis ça surtout pask mon ex m’a tant dit qu’il me tuerai un jour……!
Mata
28 octobre 2009 at 15 h 43 min
De toutes façons il n’y a pas, dans l’absolu, de motifs valable pour justifier un meurtre. Et tous les pays n’appliquent pas les mêmes règles en matière de jurisprudence: chez nous autres latins tuer "par amour" (je pouffe) est considéré comme une circonstance atténuante. Alors que chez les Anglo-Saxons ce serait plutôt l’inverse.
Philippe
28 octobre 2009 at 16 h 37 min
Donc, Mata, c’est pas tellement nous qu’il faut convaincre. lolA mon avis, seule la légitime défense devrait pouvoir justifier un meurtre, mais… où est la notion de plaisir là-dedans.
Pascal
28 octobre 2009 at 17 h 01 min
Si tu prends exemple sur les Anglo-Saxons je décline toute responsabilité
bibialien
28 octobre 2009 at 17 h 41 min
J’ai comme l’impression que Bibi n’aime pas trop les américains sous leur forme actuelle!
Pascal
28 octobre 2009 at 17 h 48 min
Je n’aime pas les hypocrites politiquement corrects qui jugent, je n’aime pas l’intolérance sous toute ses formes, les bourreaux sans sentence, les handicapés de l’amour, les "moi-je-sais-tout", etcEt il en existe dans tous les coins du monde hélas
bibialien
28 octobre 2009 at 17 h 57 min
aïe !mortelle ta chute !que dire de plus ?j’aime quand tu écris de cette façon … même si ça fout un peu les pépettes .Je vais lire les coms ….
jojo
28 octobre 2009 at 18 h 20 min
mdr !la question de bibi ouais , c’est vrai ça , 5 que tu en tues tous les jours ?wouaaahhh , ça doit bien occuper tes journées
jojo
28 octobre 2009 at 18 h 26 min
ça c’est d’la nouvelle ! Propre, efficace, sans fioritures, imprédictible ! Jusqu’à la fin j’allais dire "tiens, le ton change !" Superbe, Phil ! Chapeau bas ! (J’ai mm du relire la dernière phrase pour bien saisir ce qu’il s’était passé…)Je serais éditeur, je me jetterais là-dessus comme la chaude pisse sur le bas clergé !
Michel
28 octobre 2009 at 18 h 33 min
la vengeance est donc bien 1 plat qui se mange froid.. ou alors flambé !moi c’que je trouve désolant c’est que l’on puisse rompre une relation quelle qu’elle soit par sms ! sinon, trouver des circonstances atténuantes au crime passionnel.. je pouffe aussi !!!
Babel
28 octobre 2009 at 18 h 35 min
ben je ne suis pas certain que ce soit une affaire de vengeance… dans mon esprit le mec arrive dans un état second, sans vraiment savoir ce qu’il cherche réellement et puis, paf! il la flingue. Sans même entendre ses dernières paroles d’accueil pourtant chaleureuses.Le juge pourra objecter que le fait de détenir une arme blanche induit la froide préméditation, mais pour moi le type s’est retrouvé plongé 5 ans en arrière et ce qu’il avait tu au fond de lui s’est finalement exprimé, irréversiblement … 30 ans avec période de sureté des deux tiers je dirais.merci de vos commentaires tous.
Philippe
28 octobre 2009 at 18 h 49 min
Bon dieu… t’es trop dur Philippe. Déjà je commençais à la voir avec tout ses charmes et son charme… fallait il ? il aurait pu lui envoyer une admonestation par SMS. J’étais tellement premier degré soumis à ton entregent littéraire… JB
Jean Baptiste Lucchini
28 octobre 2009 at 18 h 58 min
Egal à toi même, tu écris merveilleusement bien… bonne soirée
Ana
28 octobre 2009 at 19 h 08 min
Ne prends pas Dupont Moretti comme avocat. La il te faut du Vergès. Bises
Caiçara
29 octobre 2009 at 7 h 02 min
Philippe…il me semble qu’à 5 ans d’intervalle, ton bonhomme a eu le temps de "digérer" son sms…à part ce détail qui m’a surprise, j’aime beaucoup ton (et tes) récit(s) !!!Dominique.
Dom
29 octobre 2009 at 13 h 38 min
Ceci est un crime passionnel (ce sont les 5 ans qui m’inquiètent) ce n’est pas du ressort de Vergès ! Peut-être de maître Lombard ?Faut voir…
Dom
29 octobre 2009 at 14 h 20 min
Cinq ans, SMS… Pourquoi, ça résonne en moi…?
Pascal
29 octobre 2009 at 14 h 27 min
je reçois un mail me disant…..vas lire ça….donc me voilou……….et paf……… le chien!!!!!….nan nan……la chute est dingue…..elle ne manque pas de culot et de sans froid, comme si de rien n’était…….ben crotte alors……le pauvre garçon, pétage de plomb…..et paf l’a tu……..J’adore ta nouvelle Philippe….merci M
val
29 octobre 2009 at 18 h 24 min